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Pour cette soirée d'été, nous nous sommes laissées séduire par une sortie nature proposée par la Maison de la Loire, intitulée avec malice "Les dents de la Loire". A Saint-Dyé-sur-Loire, charmant village classé "Petite cité de caractère", nous imaginons notre aventure crépusculaire en compagnie de Julien, notre guide nature du soir...
Le soleil d’été est encore chaud à l’heure où nous rejoignons Julien, notre guide nature pour cette soirée à la rencontre du castor. “L'animal est sauvage et craintif” prévient-il lors du petit brief avant le départ. Comme pour toute observation des animaux sauvages, nous savons que rien n’est garanti...
Mais notre préoccupation du moment est toute autre : monter dans le canoë et rester au sec !
Chacune choisit sa place : à l’avant, c’est le moteur ! Il faut ramer pour faire avancer le canoë. A l’arrière, c’est la direction. Si nous prenons des branches sur le côté, nous connaîtrons la responsable !
L’embarcation se révèle plus stable qu’imaginé. Nous sommes les premières du groupe à nous retrouver au beau milieu de la Loire et nous prenons le temps d’observer les quelques oiseaux alentours.
“Penses-tu qu’ils se moquent de nous ?” me demande ma co-pilote avec un sourire taquin !
“C’est plutôt facile finalement” se disent les aventuriers du soir. Dès le premier kilomètre, la faune offre un ballet nature impressionnant. “Là ! Quel est-ce grand oiseau blanc ?” Et plus loin, “Sur la berge, regardez ! Celui-ci est tout noir !”.
Julien, tel un “oiseauphone” expérimenté, répond sans hésitation, tout en nous montrant ce que nos regards amateurs ne savent pas encore déceler. Aigrettes, cormorans, hérons cendrés, martin-pêcheurs, faucons... s’envolent ou atterrissent sans se préoccuper de notre soif de connaissance.
Sans nous rendre compte du temps déjà passé à bord de nos canoës, une île apparaît devant nous. “Nous allons accoster sur la petite plage à gauche... et en marche arrière s’il vous plaît !”
En mauvaises élèves, nous ramons (c’est le cas de le dire) pour effectuer la manœuvre. Sous les rires amusés du reste du groupe, nous posons enfin pied à terre…
L’imposant cygne qui régnait en maître sur la plage avant notre arrivée nous toise d’un peu plus loin. Sur le sable humide, nous partons à la découverte des habitants de l’île.
Julien partage ses connaissances avec passion. Nous apprenons à faire la différence entre les traces de pas laissées par les sangliers, les chevreuils, les renards... et les castors ! Autour de nous, les grenouilles invisibles offrent un concert saisissant de coassements sonores. Nous nous invitons au cœur de ce monde sauvage, le temps d’un pique-nique.
Pause gourmande et instructiveTout en trinquant, verre de Cheverny en main et produits locaux posés à l’ombre des canoës, nous écoutons attentivement notre guide nature nous raconter l’histoire du castor, de sa destruction et de sa réintroduction.
“Pour la suite de la balade, je vous donne une astuce pour ne pas confondre castor et ragondin : si vous voyez deux bosses à la surface, c’est un ragondin. Si une seule bosse dépasse de l’eau, ce sera notre ami le castor !” Nous avons hâte de mettre la théorie en pratique.
Julien nous demande si nous avons déjà entendu parler du castoreum. Cette sécrétion huileuse et odorante est produite par des glandes s'ouvrant dans le cloaque du castor, près du pénis et de l'anus. C'est là que nous nous demandons qui a eu l'idée d'utiliser cette partie de l'animal, causant inévitablement sa mort, pour fixer les parfums en cosmétique, voire les arômes dans l'alimentation ?!
"Tendez vos bras" nous propose Julien, un flacon à la main. "Il s’agit aujourd’hui d’un castoreum de synthèse, le naturel étant interdit" nous rassure-t-il, mais l'odeur est bien celle du castoreum naturel. Nous voici en un instant "parfumé" au castoreum ! L'odeur est assez forte et, admettons-le, pas très agréable !
Le castor, après des siècles de chasse pour sa fourrure et son castoreum, est le premier animal qui fut protégé en Europe. Il y a 50 ans, le castor encore présent sur le Rhône a permis, par la réintroduction, de recoloniser la Loire de Nantes à Roanne. Une soixantaine de réintroductions en France lui ont permis de retrouver sa place sur une grande partie du territoire : une chance pour nos écosystèmes...
Le temps de l’observation et, espérons-le, de la rencontre avec les “Dents de la Loire” nécessite un petit aménagement des canoës. Afin d’être les plus discrets possibles et de ne pas nous éparpiller sur le fleuve, nous attachons tous les canoës ensemble. Ce sera plus facile pour Julien de nous parler en chuchotant.
Le ciel prend des teintes roses et pastels. Autour de nous, un calme vivant nous enveloppe. Ce n’est pas silencieux. Une partie de la nature s’endort et laisse place à une autre, qui se réveille à mesure que le soleil se couche.
Au-dessus de nous, un balbuzard pêcheur cherche son dîner. Nous retenons notre souffle en le regardant plonger, lui souhaitant une chasse réussie. Devant, un mouvement dans l’eau nous saisit. “Un castor ?” demande une passagère. “Non, un ragondin !” explique Julien. “Souvenez-vous ! Il faut compter les bosses” ! Pas de chance pour cette fois : il y en a bien deux.
Tout à coup, Julien nous fait signe de poser nos jumelles : "il est là, tout prêt". Le castor nous fait l’honneur d’une apparition, filant sur le fleuve pour s’arrêter quelques secondes sur la berge. Le temps de se lécher les pattes et le museau et plouf ! Le voilà déjà reparti vers des profondeurs inaccessibles à nos yeux ébahis.
Nos canoës passent à côté de sa cachette. Nous nous retournons pour voir si l’animal timide n’attend pas notre départ pour sortir à nouveau. Sans bruit, nous quittons ce petit bras emprunté plus tôt pour revenir au cœur de la Loire.
Les chaudes lumières du jour qui s'achève sur la Loire embrasent nos canoës une dernière fois.
Sur les berges du fleuve, la civilisation vient fermer la parenthèse enchantée que nous venons de vivre. Les villages alentours nous ramènent au monde des humains, laissant la nature sauvage à sa vie nocturne dont nous connaissons à présent davantage l'histoire et ses rebondissements...